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Prodige et prophète

La vie d'Arthur Rimbaud

Rimbaud est un aérolithe, un poète venu d’une autre galaxie. Et pourtant il est né dans la grisaille de Charleville, dans le nord-est de la France, un jour d’octobre 1854. Son père, militaire, est absent ; sa mère, paysanne, est autoritaire. Arthur est d’abord un élève brillant et obéissant. Il commence à écrire dès l’enfance. A l’âge de 15 ans, il commence à s’échapper du milieu familial, fugue à Paris, rencontre les poètes de la capitale, cherche à se faire publier. Très vite c’est la liaison avec Verlaine, la fuite à Londres avec lui, et une rupture qui s’achève par un coup de revolver.

Il a dix-huit ans, et son œuvre poétique versifiée est achevée. Avant l’âge de vingt ans il écrira encore deux textes majeurs pour la poésie des siècles à venir : Une Saison en enfer (le titre est de lui) et les Illuminations (le titre n’est pas de lui).

Puis, le silence. Rimbaud laisse la poésie derrière lui (ou en lui ?) et s’en va chercher l’aventure en s’engageant comme mercenaire dans l’armée néerlandaise quelques temps, ce qui lui permet de voyager et de toucher une prime. Il déserte. On retrouve sa trace en Autriche, en Italie, puis en Éthiopie où il tâche de faire fortune avec beaucoup d’énergie, mais sans grand succès, dans le commerce et même le trafic d’armes. Malade, il revient en France et meurt après l’amputation d’une jambe dans un hôpital de Marseille en 1891, à l’âge de 37 ans.

Un effrayant poète

« Vous avez perdu de ne pas assister au dernier dîner des affreux bonshommes… Là fut exhibé (…) un effrayant poète de moins de 18 ans, qui a nom Arthur Rimbaud. Grandes mains, grands pieds, figure absolument enfantine qui pourrait convenir à un enfant de treize ans, yeux bleus profonds, caractère plus sauvage que timide, tel est ce môme, dont l’imagination, pleine de puissances et de corruptions inouïes, a fasciné ou terrifié tous nos amis. »

 

Lettre de Léon Valade, 5 octobre 1871

Rimbaud et son époque

Arthur Rimbaud commence par se révolter. C’est une révolte artiste, individualiste, contre son époque, son milieu. Comme beaucoup d’hommes et de femmes de son temps -il est né en plein second empire-, il étouffait sous l’ordre moral et social. Comme chez Flaubert, les figures du bourgeois sont pour lui des repoussoirs. Monté à Paris sous les instances de Verlaine, il impressionne le cercle des poètes parnassiens. On lui reconnait du génie. Mais son tempérament insociable et sa liaison avec Verlaine le coupent du milieu littéraire. Ses projets de publication échouent. Une Saison en enfer n’a aucun succès.

C’est une fois installé en Éthiopie, dans son commerce, que des échos d’une notoriété grandissante lui parviendront. Et en effet, en France, par les efforts de Verlaine notamment, sa renommée commence à croître. Son sonnet « voyelles » est presque un manifeste de l’école symboliste. Rimbaud n’en voudra rien savoir et affichera toujours à ses relations un mépris complet pour la littérature et ses écrits de jeunesse. Il s’occupe désormais d’organiser de longs voyages en caravane, de diriger le personnel de la fabrique pour laquelle il travaille.

Rapport de police

« Comme moral et comme talent, ce Raimbaud [sic], âgé de quinze ou seize ans, était et est une monstruosité. Il a la mécanique des vers comme personne, seulement ses oeuvres sont absolument inintelligibles et repoussantes. »

 

Rapport de police sur Arthur Rimbaud, 1er aout 1873

Sa place dans l'histoire de la littérature

Par sa précocité, sa trajectoire étonnante, Rimbaud est devenu l’incarnation même de la poésie rebelle et vagabonde. Et surtout, à la fois par sa vie et par son œuvre, il est peut-être le poète ayant eu le plus d’influence sur sa postérité. Son œuvre a ouvert des horizons nouveaux à la poésie, et même, au langage en général. Les poètes qui viendront après lui se situeront par rapport à lui. Avec 50 ans d’avance, il préfigure le surréalisme. Plus tard encore, Bob Dylan et Patti Smith se réclameront de lui (elle ira jusqu’à acheter la maison familiale des Rimbaud, à Roche !) Dans Illuminations, il donne toute sa puissance au vers libre, jusqu’alors simplement esquissé.

En somme, Rimbaud a fait entrer la poésie dans la modernité. Il a, dit Kleber Haedens, « étendu le champ d’exploration de la poésie (…) Après les Illuminations, les valeurs changent. Tout ce qui était tenu pour méprisable et dépourvu de signification jusqu’alors (…) envahit et submerge les constructions ordonnées de la pensée unie au songe. La littérature acquiert d’un seul coup des richesses insoupçonnées. »

Un orage d'avril

« Rimbaud a fait fleurir le monde comme un orage d’avril. »

 

Jean Cocteau

Pourquoi Rimbaud est un écrivain extraordinaire

Rimbaud se vit, Rimbaud s’éprouve. Car il est un poète incandescent, qui croit, de toutes ses forces, en la puissance du langage. Et c’est sans doute pourquoi il passe pour l’incarnation de la poésie. Il n’écrit pas pour faire joli. il n’écrit pas pour faire carrière. Après ses vingt ans, silence total. Il a écrit pour mettre au jour toutes les puissances de l’homme, pour donner forme à des états extrêmes. C’est la sincérité, la violence et la singularité de Rimbaud qui, avant tout, en font un écrivain hors du commun.

Silhouette Rimbaud
Arthur Rimbaud, par Paul Verlaine
Fan zone

« On reçoit au moins 2 ou 3 lettres par semaine pour Arthur Rimbaud »

 

Bernard Colin, gardien du cimetière de Charleville-Mezières, en 2019

Œuvres principales - extraits

Poèmes en vers

Poèmes en prose