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Les chercheuses de poux

 

 

 

Rimbaud a 15 ans, il fugue à Paris, mais sans billet, il est arrêté. Il écrit à son professeur de français Izambard (âgé de 20 ans) qui l’héberge chez lui, à Douai, en attendant de le faire revenir chez sa mère. Chez son professeur, Arthur a passé quelques semaines de bonheur. Il y avait là notamment trois sœurs qui ont visiblement troublé Rimbaud par une tendresse à laquelle il n’était pas habitué… 

 

 

 

 

 

Quand le front de l’enfant, plein de rouges tourmentes,

Implore l’essaim blanc des rêves indistincts,

Il vient près de son lit deux grandes soeurs charmantes

Avec de frêles doigts aux ongles argentins.

 

Elles assoient l’enfant auprès d’une croisée

Grande ouverte où l’air bleu baigne un fouillis de fleurs,

Et dans ses lourds cheveux où tombe la rosée

Promènent leurs doigts fins, terribles et charmeurs.

 

Il écoute chanter leurs haleines craintives

Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés

Et qu’interrompt parfois un sifflement, salives

Reprises sur la lèvre ou désirs de baisers.

 

Il entend leurs cils noirs battant sous les silences

Parfumés ; et leurs doigts électriques et doux

Font crépiter parmi ses grises indolences

Sous leurs ongles royaux la mort des petits poux.

 

Voilà que monte en lui le vin de la Paresse,

Soupirs d’harmonica qui pourrait délirer ;

L’enfant se sent, selon la lenteur des caresses,

Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer.

 

 

***