Si les hommes sont à la fois victimes et bourreaux, le grand sadique serait Dieu lui-même : un personnage tout-puissant qui s’amuse à générer des maladies épouvantables, un Créateur que le narrateur surprend, dans une scène traumatique, à saisir un homme entre ses griffes.
« Il lui dévorait d’abord la tête, les jambes et les bras, et en dernier lieu, le tronc, jusqu’à ce qu’il ne restât plus rien ; car, il croquait les os. Ainsi de suite, durant les autres heures de son éternité. »
Mais la cruauté la plus manifeste est d’abord celle des hommes entre eux. Elle se traduit par l’absence de compassion des adultes, et elle naît naturellement dans le cœur de l’enfant “déjà pervers contre sa mère”.
Ce sadisme est aussi celui de Maldoror, au cœur rempli de poison. Maldoror fait le mal par goût, gratuitement. Drôle de héros ! En fait, Lautréamont a pour projet de nous obliger à regarder ce que nous ne voulons pas voir : la nature humaine sans déguisement, et dans ses zones les plus retranchées.
« Le rire, le mal, l’orgueil, la folie, paraîtront, tour à tour, entre la sensibilité et l’amour de la justice, et serviront d’exemple à la stupéfaction humaine: chacun s’y reconnaîtra, non pas tel qu’il devrait être, mais tel qu’il est. »