Marguerite de Navarre
L'âme de la Renaissance
L'âme de la Renaissance
La vie de Marguerite de Navarre
Marguerite de Navarre naît en avril 1492 à Angoulême, dans une branche de la dynastie capétienne. Son père meurt quand elle est très jeune. Sa mère, Louise de Savoie, lui donne une éducation soignée où les livres sont très présents : Marguerite apprend le latin, le grec, l’espagnol, l’italien. Louise, Marguerite et François -le frère adoré- forment un trio très soudé. A 17 ans, Marguerite se marie avec le duc d’Alençon, l’un des hommes les plus riches du royaume. Avec sa mère et son frère, elle brûle de jouer les premiers rôles. Et justement, le roi Louis XII meurt sans enfant mâle. C’est donc le frère de Marguerite qui devient roi de France sous le nom de François Ier, en 1515. Le nouveau monarque a pour sa sœur une grande estime et une confiance totale. D’après Brantôme, il se repose sur elle pour de nombreuses affaires et ses qualités intellectuelles et diplomatiques frappent les ambassadeurs.
Parallèlement, Marguerite publie ses premières œuvres et protège le cénacle de Meaux, un réseau d’érudits qui entend réfléchir librement aux rites catholiques et revenir aux sources des textes sacrés. La Sorbonne (c’est-à-dire la faculté de théologie de Paris) voit d’un très mauvais œil ces initiatives bien proches des critiques Luthériennes.
Un rôle politique
En 1525, coup de tonnerre dans le royaume : François Ier est fait prisonnier par Charles Quint lors de la bataille de Pavie. Pour ne rien arranger, le mari de Marguerite est impliqué dans la responsabilité de la défaite. Accablé par la honte et diminué par un coup de froid, il meurt la même année malgré les soins de sa femme. Mais Marguerite n’a pas le temps de pleurer. Sa mère (devenue régente du royaume) lui fait prendre la tête d’une ambassade extraordinaire de 300 cavaliers pour négocier la libération du roi, détenu à Madrid. Elle sauve de justesse son frère qu’elle trouve dans un état comateux mais ne parvient pas à repartir avec lui, Charles Quint se montrant inflexible.
François Ier revenu en France quelques mois plus tard, Marguerite devient reine de Navarre en se remariant avec Henri d’Albret en 1527, un homme bouillant et un peu sot, obsédé par la reconquête de territoires perdus. Tout en calmant les aspirations expansionnistes de son mari, elle continue à jouer un rôle politique important à l’échelle du royaume de France, siège au Conseil du roi et participe avec sa mère à l’élaboration de la « paix des Dames » en 1529.
Repli intérieur
En 1533, la réédition d’une œuvre de Marguerite (Le Miroir de l’âme pécheresse) provoque l’indignation de la Sorbonne. François Ier soutient sa sœur contre les catholiques intransigeants. Mais l’affaire des Placards (1534) provoque la colère du roi. On brûle des libraires place Maubert. Bientôt, on torturera aussi à Genève. Marguerite sait que ses rêves œcuméniques n’ont plus d’avenir : l’atmosphère est à l’affrontement entre l’autorité catholique et les protestants.
En 1540, François s’oppose à Marguerite au sujet du mariage de sa fille Jeanne d’Albret (la future mère de Henri IV). La reine de Navarre se retire dans ses terres, à Mont-de-Marsan et à Nérac notamment. Les persécutés viennent y trouver refuge. Marguerite a la cinquantaine. Son œuvre littéraire des dernières années (retrouvée en 1895) atteint sa maturité et parachève la méditation d’une vie intérieure consacrée à l’amour et à la foi. Bouleversée par la mort de son frère en 1547, elle meurt deux ans plus tard, à l’âge de 57 ans.
« Moi je ne sens qu’amour dedans mon cœur »
La distinction du vrai amour
Marguerite et son temps
La vie de Marguerite de Navarre coïncide avec ce qu’on a appelé la première Renaissance, la plus heureuse, celle qui précède les guerres entre catholiques et protestants. Marguerite incarne ce que cette période a eu de meilleur : au-delà de son rôle politique et diplomatique, elle a encouragé la politique culturelle de son frère au moment où il créait le collège de France et des chaires de grec et d’hébreu à l’université. Elle a protégé les érudits qui cherchaient à revenir aux sources des textes bibliques, et elle-même fut un auteur de premier plan dans cette période. Lorsque les positions se sont durcies côté protestant et côté catholique, elle a défendu une voie de tolérance et de liberté à l’intérieur du catholicisme.
Recherche et interrogations
Si elle personnifie le dynamisme intellectuel de cette période, Marguerite de Navarre manifeste aussi ce que la Renaissance eut de troublé et de tourmenté : ses écrits témoignent de sa recherche intense du bonheur, de sa désillusion vis-à-vis de l’amour et de la littérature, de ses interrogations métaphysiques sur le salut et sur la grâce (Comédie de Mont de Marsan).
« Comment n’aimerions-nous pas, selon Dieu, une telle héroïne ? Une telle amazone ? »
Erasme, au sujet de Marguerite de Navarre
Sa place dans l'histoire de la littérature
1492 : c’est l’année de naissance de Marguerite et c’est aussi la date qui marque la fin du Moyen-âge. La reine de Navarre est l’héritière des fabliaux, des mystères, des dialogues de Christine de Pisan et d’autres. Mais elle annonce aussi des temps nouveaux. Avant Ronsard, elle doit être considérée comme la première poète lyrique de notre littérature (les Adieux). Le recueil de L’Heptaméron inspiré de Boccace est l’un des ancêtres de la nouvelle actuelle.
L’Heptaméron a paru en 1558 dans sa version complète, mais il a fallu attendre 1895 pour qu’Abel Lefranc découvre avec stupeur un coffre contenant les dernières poésies de Marguerite de Navarre, rassemblées par sa fille Jeanne d’Albret. Même si la poésie de la Renaissance ne suscitait plus qu’un intérêt universitaire, de nouvelles perspectives s’ouvraient alors sur l’œuvre de Marguerite de Navarre.
Vocations féminines
A une époque où les hommes dominaient le champ littéraire, Marguerite de Navarre a eu un rôle certain dans l’accès des femmes au statut d’auteur. Elle ne fut pas la première à publier en son nom dans l’histoire de la littérature française. Néanmoins, sa position sociale, politique, l’aura de sa personnalité, la diversité de ses talents littéraires, ont encouragé de nombreuses femmes à écrire.
« Le temps a inventé les arts. »
Marguerite de Navarre, Chanson.
Marguerite de Navarre, un écrivain extraordinaire
L’œuvre de Marguerite de Navarre donne à voir d’abord une trajectoire hors-norme : après des débuts assez conventionnels (les Dialogues), elle affirme peu à peu sa singularité et ses poèmes se font de plus en plus l’expression de tourments intimes, jusqu’à ses dernières poésies qui débouchent sur une sorte de constat d’échec et sur la nécessité du silence.
Dans les contes de l’Heptaméron, dans son théâtre, dans ses poèmes longs ou courts, Marguerite s’interroge sur l’amour. Elle l’explore dans ses failles, ses beautés, son charme, ses déceptions. Et si elle s’efforce de « monter en espoir » pour rejoindre l’amour de Dieu, cette ascension se fait dans l’ambivalence, tant cette reine aime les sensations de l’amour, caresses, poèmes, promesses, élans, battements de cœur.
Extraits
Poésie
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Martyre d'amour
La Coche
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"Je regarde de tous côtés..."
Elégies
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Voir un homme nu
La distinction du vrai amour
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"Navire loin du vrai port..."
La Navire
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"Le dirai-je..."
Dernières poésies
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Amitié trahie
Dernières poésies
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Les adieux
Dernières poésies
Théâtre
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"Mon coeur est à moi"
Comédie des quatre femmes
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Aimer ou haïr le plaisir
Comédie de Mont-de-Marsan
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La sagesse par la joie
Comédie de Mont-de-Marsan
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Adieu raison !
Comédie de Mont-de-Marsan
Prose
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Viol et meurtre
L'Heptaméron
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Engluée dans le vomi
L'Heptaméron
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Inceste maternel
L'Heptaméron